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Le Brésil, nouvelle terre d’avenir pour le secteur EdTech ?

Brésil EdTech

Un écosystème EdTech au Brésil, étonnant vous dîtes ? Alors que le secteur de l’éducation en Amérique latine est encore confronté à de nombreux défis, les transformations digitales affectent aussi l’éducation dans l’État-continent. Pays aux multiples visages, l’ancienne colonie portugaise présente certes de nombreuses faiblesses mais ne perd pas pour autant de vue les nouvelles tendances qui pourraient lui être profitables. Alors, quel avenir pour le secteur EdTech dans les contrées auriverdes ? Quelles sont les dynamiques du marché ? Envolons-nous le temps d’un instant vers cette terre de contrastes et de possibles et découvrons les caractéristiques d’un secteur émergent.

L’éducation, point névralgique du développement brésilien

“Le Brésil n’est pas un pays pauvre, c’est un pays injuste.”

Fernando Henrique Cardoso, président du Brésil (1994-2002)

Inégalités, pauvreté, violence et corruption : autant dire que le portrait de l’ « éternel pays d’avenir » selon les dires de Georges Clemenceau n’a pas toujours été glorieux. Ces maux trouvent en majorité leur origine dans l’éducation, longtemps parent pauvre de la politique du Brésil. La pandémie a révélé le marasme dans lequel végète le pays. Sous-équipement des établissements, désengagement croissant de l’État depuis l’investiture de Bolsonaro, inégalités entre les élèves du public et du privé et fracture numérique : 2020 a été une année perdue pour beaucoup d’écoliers. 26 % des enfants scolarisés dans l’enseignement public étaient alors toujours sans ressources éducatives en ligne.

Attardons-nous sur le système éducatif brésilien. Celui-ci se caractérise par une privatisation croissante de l’enseignement public. Plus largement, la trajectoire néolibérale empruntée par le gouvernement depuis les années 1990 a favorisé le désaveu porté par les politiques à l’éducation et le profond fossé qui existe entre les élèves. Le réseau public scolarise la majorité des élèves tandis que le réseau privé est réservé aux élites. Deux visages donc pour deux classes sociales. Cette tendance historique s’est accélérée à vitesse grand V avec le tournant autoritaire pris par le pays sous Bolsonaro. Et la crise sanitaire n’a fait qu’aggraver des inégalités déjà abyssales.

Pour pallier ces failles, le gouvernement a mis en place différentes initiatives. Les programmes Bolsa Familia et ProUni offrent ainsi une aide aux étudiants défavorisés et leur famille. Le projet “Todos pela Educação“ lancé en 2006 a pour but d’assurer à tous le droit à une éducation de base de qualité d’ici 2022. Des actions sont donc entreprises pour essayer d’améliorer le système éducatif. Mais malgré la démocratisation du pays, quelques progrès et une mise au pas de l’éducation, cette dernière reste toujours le talon d’Achille de ce colosse aux pieds d’argile…

La révolution digitale en route : un moment privilégié pour l’éducation

C’était toutefois sans compter sur les nouvelles possibilités offertes par la révolution numérique. En effet, qui dit lacunes dit opportunités !

212 millions d’habitants, une superficie de plus de 8,5 millions de km2 et un PIB de 1 432 milliards de dollars le classant au 14ème rang mondial : le Brésil a un potentiel économique indéniable. Le pays est leader sur son continent et a vocation à devenir une puissance sur la scène internationale. Sa forte croissance nécessite une main-d’œuvre qualifiée. Les nouvelles technologies ont aussi leur place dans cette partie du monde parfois oubliée. Elles peuvent être une véritable chance de disrupter un système éducatif dépassé. L’Amérique latine est aujourd’hui le réceptacle d’un afflux d’investissements dans l’EdTech. En 2019, ces technologies ont ainsi représenté 4% des accords d’investissements des fonds de capital-risque pour les start-ups latino-américaines. Le secteur constitue donc une réelle opportunité pour améliorer la qualité de l’éducation.

L’engouement autour de ce secteur va de pair avec les améliorations en termes d’infrastructures et d’accès au numérique. Dans la veine de la Stratégie brésilienne pour la transformation numérique lancée en 2018, des entreprises s’aventurent ainsi sur le marché auriverde. D’ici 2024, le secteur digital au Brésil devrait connaître une croissance annuelle de 14%. Les niveaux d’accès à la téléphonie mobile et à internet ne font qu’augmenter :

Tour d’horizon du marché EdTech au Brésil

Vivier de start-ups digitales, le Brésil offre un potentiel considérable pour les entreprises EdTech. Malgré un très lourd tribut, la crise du coronavirus a joué un rôle de catalyseur pour ce marché. De jeunes pousses dont l’ambition est de profiter des opportunités EdTech émergent ainsi sur le territoire.

Le secteur a gagné du terrain au Brésil ces dernières années. En décembre 2020, on dénombrait 559 start-ups EdTech dans le pays sud-américain, plus de 6 fois le nombre recensé au début de la décennie. C’est dans le Sud-Est du pays que se concentre la majorité des start-ups brésiliennes avec une proportion supérieure à 68%.

Les grands groupes de l’éducation brésiliens profitent aussi des opportunités. Ainsi les leaders Cogna Educação, YDUQS ou Ser Educacional, entreprises cotées à la Bourse B3, se mettent à l’EdTech et commencent à investir dans des partenariats avec des start-ups.

Passons donc en revue les différents groupes et initiatives :

Les grands groupes de l’éducation se mettent à l’EdTech

Les grands groupes de l’enseignement privé surfent aujourd’hui sur la vague de l’EdTech et profitent de l’occasion pour se réinventer. Cotés en bourse, ils sont des acteurs majeurs du marché et pourraient bien être les principaux initiateurs du mouvement EdTech au Brésil.

Cogna Educação, le groupe phare brésilien

Fondé il y a près de 60 ans et anciennement connu sous le nom de Kroton, Cogna Educação est le plus grand groupe brésilien de l’enseignement privé et l’une des plus importantes organisations éducatives au monde. Il a pour but de combler le fossé en offrant une éducation de qualité aux étudiants des classes modestes. Avec 143 campus dans 101 villes, Cogna se positionne comme le leader du marché. La pandémie l’a poussé à se réinventer en proposant à ses étudiants une solution numérique et le passage aux cours en ligne à prix réduit. C’est ainsi qu’il possède aujourd’hui 28% des parts de marché dans l’enseignement à distance.

Le conglomérat est divisé depuis 2019 en quatre branches :

  • Kroton centralise toutes les activités du groupe sur le segment B2C
  • Saber fournit également des services aux étudiants par le biais de cours de langue et d’écoles
  • Platos sert le marché de l’enseignement supérieur B2B grâce à un service de gestion
  • Vasta a pour mission d’élargir l’offre de services pour le marché B2B grâce à de nouveaux contenus pédagogiques et services de gestion pour les écoles

Vasta Educação a construit une plateforme PaaS de contenu EdTech pour les écoles. Cette solution intègre contenu académique, cours en ligne et formations des enseignants.

Les solutions proposées par Vasta

YDUQS, organisme éducatif de portée nationale en tête de peloton

YDUQS regroupe plusieurs marques de l’enseignement (Estácio, Ibmec, UniToledo, Damásio Educacional…) et compte plus de 750 000 étudiants. La crise sanitaire a été l’occasion pour lui d’améliorer sa plateforme d’enseignement à distance. Il prévoit de dépasser le million d’étudiants utilisant ses services digitaux dans les deux prochaines années. Malgré une chute de ses actions de 60% l’année dernière, YDUQS a repris du poil de la bête. L’entreprise envisage d’étendre son réseau dans les régions de São Paulo, du Midwest et du Sud du pays.

Arco Educação, une société ambitieuse

Fondée en 2006, Arco Educação a rapidement commencé à croître. Elle est spécialisée dans les solutions pour l’éducation de base. Elle a notamment développé le système SAS, plateforme offrant du contenu pédagogique, des évaluations et conseils à 900 écoles partenaires. En 2018, elle devient la première start-up brésilienne d’éducation et de technologie à entrer en bourse sur le NASDAQ.

En mars dernier, l’entreprise a annoncé qu’elle venait d’acquérir auprès du Britannique Pearson, premier groupe mondial pour l’éducation, les systèmes éducatifs COC et Don Bosco. Il s’impose ainsi face au géant Cogna Educação qui négociait aussi l’acquisition.

D’autre part, Arco vient d’acquérir Me Salva!. Cette entreprise a pour but d’aider les étudiants à améliorer leur score à l’ENEM, l’examen national de l’enseignement secondaire, pour intégrer les meilleures universités. Le groupe a aussi élargi son portefeuille en investissant dans Tera. Cette start-up forme les étudiants aux métiers de la nouvelle économie (product management, digital marketing, user experience ou encore data analysis).

Les start-ups EdTech ont le vent en poupe et les levées de fonds sont là pour le prouver !

L’EdTech est un secteur porteur qui attire les investissements. Les séries A ont concentré près de 40% des investissements dans les technologies éducatives, signe d’un réel engouement qui n’en est qu’à ses débuts !

Nouvelle destination des financements, le Brésil voit l’ascension de nombreuses start-ups qui se positionne sur le marché EdTech.

Le fonds pionnier américain Accel Parners a ainsi investi 10 millions de dollars dans la série B d’EduK, une start-up EdTech fondée en mai 2013. Cette dernière propose des cours en ligne sur des sujets variés (business, odontologie, photographie, design…). Elle compte utiliser l’argent pour se développer en Amérique du sud.

En février dernier, une autre start-up EdTech de premier rang a clôturé un tour de table de 84,5 millions de dollars : Descomplica. L’opération a été menée par Invus Opportunities et SoftBank mais aussi par le guitariste de U2 et Valor Capital Group, un fonds pionnier qui dépasse les frontières entre les États-Unis et le Brésil. Ce financement servira au lancement de Descomplica College. Cette école a l’ambition de former un million d’étudiants sur un modèle 100% digital, et la croissance de son portefeuille. L’entreprise a d’ailleurs été nommée “Technology Pioneer” par le Forum économique mondial en 2020. Une pépite brésilienne qui a donc un bel avenir devant elle !

Après avoir acquis pour 250 millions de dollars la plateforme Teachable en mars 2020, le leader Hotmart vient de lever 130 millions de dollars lors d’une série C. Déjà bien installée sur le territoire et à l’international (Pays-Bas, États-Unis, Espagne…), l’entreprise fondée en 2011 veut ainsi parfaire sa stratégie d’expansion.

Enfin, avec une ronde de 150 millions de dollars en mai dernier, Afya a reçu un investissement considérable du fonds latino-américain Softbank (série A). Afya est le plus grand groupe d’éducation médicale au Brésil. Il offre aux médecins des produits numériques pour améliorer les services de santé et les accompagne tout au long de leur carrière.

Le Brésil, futur hub EdTech ?

La Brazilian Tech est aujourd’hui en ébullition. Le forum Bett Brasil Educar est l’incarnation même du potentiel EdTech au Brésil. Avec plus de 30 000 participants, 270 entreprises conviées et 30 start-ups EdTech, il est un événement de premier rang, manifestation de la portée du secteur au Brésil. Sa mission ? Transformer l’éducation pour un futur meilleur. Ce rassemblement bouillonnant d’idées s’inscrit dans la série de forums BETT initiée par l’organisateur britannique Hyve Group. Le Brésil est donc incontestablement une terre d’opportunités à suivre de près !

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