Préambule : EdTech Capital lance l’annuaire des écoles et formations de l’enseignement supérieur privé en France ! Grandes Ecoles, écoles alternatives, bootcamps, formations intensives thématiques… Remplissez notre formulaire afin de faire figurer votre école dans l’annuaire 🎓
Encore inexistantes il y a quelques années, les nouvelles formations dans l’enseignement supérieur (ESR) privé font de plus en plus parler d’elles : écoles spécialisées dans la Data, la Vente, l’Intelligence artificielle, les formations en Développement Web, en RSE, etc.
Fin 2020, un article des Echos Start titrait : “La fac, la grande école ? Non merci. Pour ces jeunes, ce sera une nouvelle école alternative”. L’article citait Humind, Iconoclass ou encore Le Wagon. Pourtant 2 ans plus tard, les acteurs historiques de l’enseignement supérieur (universités, écoles d’ingénieurs et de management, BTS, etc.) attirent toujours la grande majorité des étudiants sur les 2,97 millions de l’année scolaire 2021-2022 selon les chiffres du gouvernement.
Parmi ces 3 millions d’étudiants en France, environ 25% sont inscrits dans l’ESR privé (un effectif en hausse de 10% entre 2020-2021 et 2021-2022 selon la note flash du SIES de juillet 2022) et sont disputés par tout un panel d’écoles et de formations. Dans cet environnement, et bien loin de former un groupe homogène, les nouvelles formations alternatives font face à une multitude d’enjeux afin de s’affirmer sur le marché face – ou aux côtés ? – des acteurs historiques.
Disclaimer : cette proposition d’analyse est personnelle, comporte nécessairement des éléments subjectifs et ne constitue en rien une analyse exhaustive du marché de l’enseignement supérieur en France.
Les nouvelles écoles et formations alternatives en bref
Il est bien difficile de tenter de définir les formations alternatives comme un tout homogène. Globalement, cette publication désigne par ‘écoles’ ou ‘formations’ alternatives des organismes dans l’enseignement supérieur privé opérant généralement sur une (parfois plusieurs) thématiques clefs : la science des données, l’intelligence artificielle, le code, le développement web, la RSE, etc.
Ces organismes proposent des programmes aux formats divers : des formats les plus courts (certifications pouvant être obtenues en quelques semaines) aux plus longs (Bachelors, voire Masters) en passant par les bootcamps (formations intensives). Certaines se définissent comme véritables alternatives aux cursus classiques de l’ESR : université, écoles d’ingénieurs ou de commerce, BTS, etc.
On peut dresser d’ores et déjà une typologie de ces formations qui font l’actualité.
- “Néo-Grandes Ecoles du XXIe siècle” : Albert School, Oteria Cyber School, Gaming Campus, PSTB, Luca School. Ces écoles permettant à l’étudiant de viser un niveau Bac +3 à Bac +5 dans des métiers où les entreprises sont en pénurie de compétences. Elles visent du revenu récurrent ;
- Les formations courtes de haut-niveau en hard skills : Le Wagon, Iron Hack, Holberton School : des modèles reposant avant tout sur des formations courtes orientées autour de hard skills qui servent à compléter une formation initiale effectuée par ailleurs.
- Les formations courtes grand public en soft skills : Iconoclass, Akimbo (anciennement Humind) ou Rocket School : écoles globalement centrées sur le business development. Elles dépendent souvent de financement publics et de partenariats (avec Pôle Emploi notamment).
Force est de constater que les termes ‘écoles ou formations alternatives’ sont bien génériques pour des organismes pourtant très hétérogènes (et de plus en plus nombreux) : de par les types et les durées des programmes proposés, leur niveaux (niveau des apprenants à l’entrée, et niveau visé en sortie), leur reconnaissance sur le marché et par les entreprises, ou même leur qualité pédagogique.
Une caractéristique commune se détache toutefois pour les programmes les plus longs : le modèle économique et pédagogique de ces écoles séduit, notamment porté par l’alternance. D’autant plus que l’apprentissage bénéficie d’un fort soutien politique inhérent aux dernière reformes (réforme du financement de l’apprentissage, aides de l’Etat, etc.). Les chiffres sont sans appel : plus de 830 000 apprentis en France en 2021 (une croissance de 30% par rapport à 2020, et de 50% sur le seul segment de l’alternance dans l’enseignement supérieur).
Des modèles qui séduisent de plus en plus
Sur le plan pédagogique, nombre d’écoles et formations alternatives misent sur la ‘pratique’, et se posent bien souvent en opposition à un enseignement présenté comme trop ‘théorique’ dans les organismes d’enseignement historiques. L’enseignement se veut fondé sur des cas pratiques, des rencontres avec des professionnels, etc.
Pour les programmes sur plusieurs années, l’alternance est très souvent plébiscitée : elle favorise une meilleure insertion sur le marché de l’emploi, tout en favorisant un apprentissage pratique et pour les entreprises un investissement sur de futurs collaborateurs. Notons que l’apprentissage est de moins en moins différenciant pour les écoles alternatives à mesure que les acteurs historiques de l’enseignement supérieur ouvrent eux-aussi de plus en plus de programmes en alternance.
Les écoles séduisent également par leur modèle économique : des revenus importants perçus généralement en début de formation (à l’exception des modèles aux frais payés une fois l’apprenant contractualisé/diplômé), récurrents selon la durée du programme, un financement B2B dans le cas de l’alternance, et finalement la promesse d’une rentabilité à court ou moyen terme pour des investisseurs qui n’hésitent pas à entrer au capital en amorçage (l’année dernière, Oteria Cyber School, Ada Tech School ou encore Iconoclass levaient chacune 3 millions d’euros).
Sur le plan légal et stratégique, l’enseignement supérieur en Europe reste globalement bien moins réglementé que l’éducation sur le segment K12 (de la maternelle à la terminale). L’éducation et la formation dans l’UE relèvent par ailleurs de la compétence exclusive des Etats. Le risque de régulation politique globale est donc moins important dans l’ESR en Europe, qu’en Inde ou qu’en Chine par exemple…
Malgré ce tableau éloquent sur le papier, les écoles et formations alternatives font face à d’importants enjeux : de la réputation à la concurrence en passant par l’expérience étudiante.
Les formations alternatives face à une kyrielle d’enjeux
Si en France créer un organisme et proposer une formation dans l’enseignement supérieur est relativement simple sur le plan légal, parvenir à s’affirmer sur le marché ultra-concurrentiel de l’ESR privé en est une autre. Voici un condensé des enjeux auxquels font face et avec lesquels doivent composer les nouvelles écoles et formations alternatives (liste non-exhaustive) :
- Enjeu de légitimité : comment affirmer sa légitimité, et la légitimité du corps professoral, tant face aux apprenants que face à la concurrence ? Les professeurs dans les écoles et formations alternatives bien souvent ne sont pas des professeurs de métier.
- Enjeu réputationnel : construire une image de marque et une communication puissantes pour des formations jeunes, et encore assez peu démocratisées. Réussir à imposer une image de marque dans un marché bondé (Grandes Ecoles, universités renommées, grands groupes privés etc.). Il s’agit aussi de parvenir à construire un réseau alumni capable de faire rayonner l’organisme, un mécanisme maîtrisé par exemple par les Grandes Ecoles de Management et acquis avec le temps et les promotions d’étudiants.
- Enjeu concurrentiel : certains segments du marché de l’ESR privé deviennent de véritables ‘paniers de crabes’, et montrent une multiplication de formations parfois très similaires (exemples : Data, Vente / Business Development, etc.).
- Enjeu de l’expérience apprenant : personnalisation et multiplicité des parcours encore peu développée (face à des Grandes Ecoles qui peuvent par exemple proposer plusieurs dizaines de milliers de combinaisons de parcours différents à leurs étudiants) ; expérience physique (campus, vie étudiante, associative, etc.)
- Enjeu de recrutement : parvenir à constituer les premières promotions – figures de proue de la nouvelle école, stratégie de sélection à adopter (concours ou dossier, ne pas être trop ou trop peu sélectif selon le type de programme envisagé, etc.)
Difficile de composer avec tous ces enjeux pour toutes les nouvelles écoles et formations alternatives, dans un marché occupé par des mastodontes de l’éducation rôdés à l’exercice depuis plusieurs décennies (voire plusieurs siècles, pour les écoles les plus anciennes). Quelles pistes imaginer alors pour le développement futur de ces formations ?
Quelles voies de développement pour les écoles alternatives ?
EdTech Capital propose 3 pistes de développement des nouvelles écoles et formations alternatives, selon les secteurs d’enseignement, le type de programmes, etc. – les trois possibilités étant tout à fait réalisables :
- Piste ‘panier de crabes’ : développement et multiplication des formations courtes sur deux ou trois thématiques très plébiscitées (Vente, Développement Web…), qui permettent un complément de formation initiale pour les apprenants. Future dynamique de consolidation sur le marché, très forte concurrence, et difficulté à imposer une image de marque. Pas de réelle concurrence aux acteurs historiques.
- Piste ‘aquarium’ : développement de formations ultraspécialisées par les nouveaux acteurs de l’enseignement supérieur sur des verticales peu exploitées par les acteurs historiques de l’ESR, permettant une exploitation des synergies à travers des partenariats (ex : partenariat Le Wagon et HEC), voire des rachats. Complémentarité avec les acteurs historiques.
- Piste ‘océan bleu’ : développement de nouvelles écoles, comme véritables alternatives aux acteurs historiques sur des verticales encore non exploitées (ex : Albert School sur la verticale ‘Business + Data’).
Ces pistes de développement s’inscrivent dans deux tendances clefs : une demande croissante des apprenants et des entreprises sur des thématiques d’avenir, et une croissance soutenue des programmes en alternance.